Lors d'une Batteule de poésie ayant eu lieu à La petite vitesse à Saint-Brieuc en ce début février, l'ami poète Hervé Eléouet m'a demandé de traiter en alexandrins la question suivante : "À quelle heure faut-il régler son réveille-matin ?". Voici ma réponse :
Que l’on soit écolier ou salarié des postes,
Employé de mairie ou trader à New-York,
Que l’on soit jardinier, spécialiste en compost,
Infirmière, mécano, conducteur de remorque,
Pour aller au turbin, il faut bien se lever !
On ne peut décemment travailler sous la couette.
On n’a jamais croisé un juge ou un plombier
Exercer son travail l’oreiller sous la tête
Mais pour quitter la si bonne tiédeur du lit
Parfois un accessoir’ se révèle essentiel
Le temps qui file en douce, en rêve ou insomnie,
Ne se pose jamais, toujours en sentinelle.
On le mesure, ce temps, on le pèse, on le sonde,
Puisque la société sans cesse vous le réclame
Ne pas perdre une miette, pas la moindre seconde
Et un petit retard s’apparente à un drame.
Alors cet instrument vient vous sauver la mise :
Ce réveille-matin, simple mais admirable,
Qui fait tic tac tic tac, dring dring et vous dégrise
Très vit’ sa sonnerie devient indispensable.
Sa note suraiguë se joue en préambule
Avant le café noir, le pain beurre et la douche,
Avant porte qui claque et vroum du véhicule,
Avant le dur labeur… ou le gobage de mouches.
Reste à savoir alors à quelle heure le régler,
À quel moment se détacher des jolis songes
Une heure souvent suffit pour bien se préparer
Mais gare à la paresse qui souvent la prolonge.
Ainsi soyons pratiques, voire même arbitraires
Réveil à 6h16 pour train à 7h30
Réglage à 8h20 les jours d’anniversaire
Réglage à 7h15 quand on habite à Nantes
9h38 c’est bien pour weeks-ends et fériés
On met du 6 heures « Troyes » pour bien partir à l’ « Aube »
On règle à 7 h09 quand on se sent usé
Et 5h46 pour cuisiner la daube
Réveil à 8h13 pour avoir de la chance
Pour aller au bistrot, on attend 8h20
Et si on a un rhume, la fièvre, qu’on est en transe
Un bon 8h33 comme dit le médecin.
Ah ! Pour bien émerger, évitez donc le snooze
Vous savez ce bouton qui permet de gratter
Trois ou quatre minutes quand c’n’est pas dix ou douze
Parfois ce fâcheux vice agace votre moitié.
Une question se pose, et elle est pertinente :
Pour un taf en trois huit avec horaires de nuit
Et réveil à seize heures, l’instrument que l’on vante,
Faut-il le renommer réveille-après-midi ?
Si vous avez un chat, pas besoin de réveil
Ses piles d’estomac jamais ne se déchargent
Si vous avez un chien, c’est à peu près pareil :
C’est la vessie qui parle et il y a peu de marge.
Quant à moi voyez-vous, je n’ai pas de réveil.
Une curiosité ma foi plutôt pratique
M’a dotée d’un système régulant mon sommeil
Nommé communément horloge biologique.
Ainsi à la même heure, tous les jours de l’année,
En semaine ou dimanche, bronchite ou gueule de bois
Je quitte sans façon les biceps de Morphée
Au moment où la montre indique 7h23.
Et c’est assez étrange car au changement d’heure
Au passage de cell’ d’été à cell’ d’hiver
Je dors toujours en plus le temps régulateur
Avouez qu’il y a là un sacré mystère…
Cependant il serait bien agréable et doux
De ne pas avoir à calculer les minutes
Laisser glisser le temps, murmurer « Je m’en fous »
Et sombrer à nouveau dans le rêve… Allez, chut !