"Oh ! merci c'est gentil !
C'est... c'est.. c'est... c'est quoi ?"
Je sais que ça te fait plaisir
Et que c'est offert de bon cœur
(Mais parfois vaut mieux s'abstenir
Ou se rabattre sur des fleurs).
Je sais que tu voulais bien faire,
Alors j'arbore un grand sourire :
"Oh ! une statue de panthère !
Ça pourrait presque me faire rugir euh rougir."
C'est devenu habituel,
On a chacun nos p'tits défauts...
Y'a des cadeaux, c'est pas Noël,
Ça serait l'Père Fouettard plutôt...
Et l'angoisse devant le paquet,
D'autant plus grande qu'y a du volume !
Ça pèse une tonne, mais qu'est-ce que c'est ?
On dirait bien un lot d'enclumes...
J'ai même pris des cours de théâtre
Pour faire semblant d'être contente,
Quand in petto je dois combattre
Ce démon à verve mordante
Qui me dit : "Mais c'est pas possible !
C'est moche, qu'est-ce que je vais en faire ?"
Mais je bâillonne cet irascible
D'un "Merci !" que je veux sincère.
Et dans ces moments-là,
Je voudrais juste te dire pourtant :
"Allez viens sans rien, viens les mains vides, viens le cœur plein
T'encombre pas, et perds pas de temps
À trouver l'cadeau qui va bien.
Allez viens..."
Le risque est que d'autres se mettent
À croire que je fais collection
De figurines de vachettes
Ou de bols avec mon prénom...
Ça s'est déjà vu, je le sais !
J'avoue avoir contribué
À un élevage de porcelets,
Peluches, vaisselle et porte-clés...
Chez moi j'ai monté un placard
Pour tous les ratés du bolduc.
Si j'étais une folle du plumard
Ça serait ma légion d'eunuques :
C'est joli (et encore...) mais ça sert à rien !
Ça prend la place et la poussière.
Crois-tu que j'aie vraiment besoin
D'une huitième bonbonnière ?
Les étagères sont remplies
De cadavres d'anniversaires,
De vieux squelettes de bougies,
De pots pourris, de verres à bières (euh ça peut être utile ça...).
As-tu seulement envisagé
Qu'à mon prochain déménagement,
Je pourrais te solliciter
Pour porter ces cartons pesants ???
Les jours où tu me rends visite,
Je sors ta théière et les tasses
Aux gros motifs de marguerites,
Solides et qui jamais ne cassent !
Car je n'ai jamais d'accident
De mains qui glissent, de coudes qui frôlent.
Même le chat, c'est indécent,
Refuse de jouer ce rôle.
Tu sais, ce n'est pas une critique.
J'ai constaté qu'on a chacun
Son propre sens de l'esthétique :
Tu aimes les blonds, j'préfère les bruns.
Moi-même j'ai sans doute dû t'offrir
Des trucs que tu n'as pas aimés :
Le livre "Cadeaux pour faire plaisir",
Je suppose que tu l'as jeté...
Dans tous ces moments-là,
Je voudrais juste te dire pourtant :
"Allez viens sans rien, viens les mains vides, viens le cœur plein !
T'encombre pas, et perds pas de temps
À trouver l'cadeau qui va bien.
Ne m'offre rien, mais viens me voir, ne me laisse pas dans ton placard."